Morona-Santiago (Equateur) : saisir l’occasion de détruire ce qui nous détruit

[L’Équateur est le pays d’Amérique latine le plus touché en proportion par le coronavirus, le symbole médiatique de la semaine ayant été ces cadavres qui jonchent les rues de Guayaquil, capitale économique et ville la plus peuplée du pays. Le confinement a été décrété mi-mars, un couvre-feu instauré (14h-5h), l’armée déployée en force, touchant de plein fouet une population pauvre qui vit de l’économie informelle. Face à une situation sociale explosive, l’Etat multiplie d’ailleurs la distribution de miettes sous forme de bons alimentaires depuis le 1er avril à 950 000 familles, suite à plusieurs débuts d’émeute.
Le signal de la révolte n’est pourtant pas venu de la ville, mais de la zone amazonienne des Shuars, qui ont attaqué l’immense campement minier de San Carlos-Panantza de 40 000 hectares qui dévaste le territoire et contre lequel ils luttent depuis plus d’une décennie. Pendant que l’armée est suroccupée ailleurs (notamment en ville et à la frontière avec le Venezuela pour empêcher d’autres réfugiés d’arriver), c’était vraiment une bonne occasion à saisir pour frapper fort. Morts pour morts, pourquoi ne pas raser au sol ce qui nous empoisonne de façon très visible, pour qu’il n’y ait aucun retour possible à cet avant déjà si mortifère ?]

Équateur : feu au campement minier !
Indymedia Nantes, 13 avril 2020

Dans la nuit du 28 mars, le campement minier de San Carlos-Panantza de l’entreprise ExplorCobres (EXSA) situé dans la province amazonienne de Morona-Santiago a été attaqué avec des armes à feu et de la dynamite. Les gardiens ont été évacués et tout ce qui était à l’intérieur à été détruit (véhicules, équipements, bâtiments). Les médias parlent de vols de matériel de valeur.

Pour rappel cela fait environ quinze ans que l’extraction minière dans la région rencontre une opposition intransigeante et déterminée par une partie de la population locale appartenant principalement au groupe amérindien Shuar. Plusieurs projets miniers (surtout de cuivre et d’or) se concentrent dans cette région frontalière de la Cordillère du condor, entre le Pérou et l’Équateur, dévastant la forêt et ses habitants avec leurs machines et leurs poisons. En 2006 le campement de San Carlos Panantza avait déjà été délogé et occupé par un groupe de Shuar. La communauté créée à sa place, nommée Nankints, fut délogée 10 ans après par l’armée équatorienne. En novembre 2016, un groupe de Shuar attaque avec des armes à feu et réoccupe le campement (il y a eu un flic tué et plusieurs blessés des deux côtés). Mais cette fois-ci l’occupation ne dure que deux jours suite à l’intervention de l’armée, la proclamation de l’état d’urgence et l’occupation militaire de la région. À cette occasion des familles entières avaient été obligées de se réfugier dans la foret et leurs villages avaient été occupés et pillés par les militaires.

Aujourd’hui avec cette nouvelle action, on voit bien que la lutte n’est pas morte et que des individus déterminés peuvent bloquer l’avancée de ces projets mortifères.

Des solidaires

NB : Pour approfondir, voici le lien de la vidéo « Arriba las lanzas contra las minas » sur les luttes contre les mines dans la Cordillère du Condor des deux côtés de la frontière Pérou-Équateur : https://www.youtube.com/watch?v=u5mbDs3Eqak