Nouvelle-Zélande/Belgique/France : les poukaves au bout du fil

Un site de délation sur le confinement cartonne en Nouvelle-Zélande
Capital, 31 mars 2020

Le site a été au moins une fois hors service depuis son lancement en raison de l’afflux de rapports des Néo-Zélandais pour dénoncer les mauvais comportements.
En Nouvelle-Zélande, on ne plaisante pas avec le confinement. Et on n’hésite pas à dénoncer les personnes qui ne respectent pas les mesures mises en place. Selon The Guardian, les autorités néo-zélandaises ont été contraintes de mettre en place un site entièrement dédié à la “délation” en cette période particulière : ce site a été lui-même victime de son succès.

Les autorités ont décidé de lancer http://www.police.govt.nzxxxxxxx après avoir reçu plus de 2.000 appels sur la ligne d’urgence de la police la semaine passée. Mis en ligne dimanche, le site a été hors ligne au moins une fois en raison de l’affluence dessus. En moins de 24 heures, 4.000 rapports ont été rédigés par des Néo-Zélandais, qui ont dénoncé des personnes jouant au frisbee ou au rugby, ou des “coronas parties” en plein confinement. Autre problème : de nombreuses personnes continuent de fréquenter les plages ou de voyager à travers le pays en camping-car notamment.


La délation, un effet pervers du coronavirus ?
Le Vif (Belgique), 02/04/20

Alors qu’on annonce un temps radieux pour le début des vacances de Pâques, l’interdiction de se rendre à la Côte reste d’application. Certaines villes du littoral ont invité leurs habitants à appeler la police s’ils constatent des infractions.

Durant le congé pascal, des centaines de milliers Belges ont l’habitude de partir s’aérer la mer. Mais le gouverneur de Flandre-Occidentale Carl Decaluwé, appelle chacun à rester à la maison, les vacances n’étant pas considérées comme un déplacement essentiel. La police mènera des contrôles routiers, mais aussi dans les supermarchés et dans les gares. En cas d’infraction, les contrevenants s’exposent à une amende de 250 euros.

Les habitants de Nieuport, Coxyde et La Panne peuvent contacter la police s’ils constatent des infractions liées aux mesures de lutte contre le coronavirus. « Nous n’avons pas mis en place de numéro spécial, mais comme pour les vols ou bagarres, les gens peuvent appeler notre dispatching« , explique-t-on jeudi à la zone de police Westkust.

(…) Le phénomène n’a pas lieu seulement en Belgique. En France, les gendarmes constatent également un afflux d’appels de dénonciation : « mon voisin discute avec beaucoup de gens et ne respecte pas le confinement » ou « il y a trop de monde chez mon voisin« . Les forces de l’ordre en France soulignent toutefois que les appels pour signaler des rassemblements ne « sont pas de la délation, mais de la dénonciation, parce que derrière il y a un intérêt sanitaire et donc général« , estiment-elles.

En Nouvelle-Zélande, un site internet créé par la police néo-zélandaise pour signaler les violations des consignes de confinement, a rencontré un succès tel qu’il a planté quelques heures seulement après sa mise en ligne, ont annoncé lundi les autorités. « Nous avons reçu 4.200 signalements de personnes pensant que d’autres ne respectaient pas » les règles de confinement, a déclaré le chef de la police néo-zélandaise Mike Bush. « Cela montre à quel point les Néo-Zélandais sont déterminés à ce que tout le monde respecte les consignes. » Parmi les infractions signalées, figurait une fête rassemblant une soixantaine de personnes dans une auberge pour routards à Queenstown, une ville très touristique dans l’Île du Sud, mais aussi plusieurs cas de voyageurs poursuivant leur périple en camping-car en dépit de l’impératif de confinement.


Demandes insolites, délation : pendant le confinement, en Bretagne le 17 est surchargé
France Bleu Breizh Isel, 1er avril 2020 (extrait)

C’est l’une des conséquences de la mise en place du confinement. Depuis 15 jours, les appels au 17 sont en très forte augmentation pour des motifs divers et variés. A l’autre bout du fil, les gendarmes bretons sont parfois décontenancés par les demandes.

En règle générale, les questions posées portent sur les autorisations de sortie. Quelle case cocher pour telle excursion ? Puis-je faire ceci ? Ai-je le droit d’aller là-bas ? Pour éviter d’encombrer la ligne des urgences la gendarmerie d’Ille-et-Vilaine a mobilisé une personne par jour pour répondre à ces appels. Si le gros de la vague semble passer, les délations, elles, sont toujours aussi nombreuses. « Mon voisin est parti se promener à vélo, » « J’ai vu des gens rassemblés dans la rue, » « Monsieur untel a fait une fête hier soir.«   Embarrassés, les gendarmes répondent qu’ils font des patrouilles et que les comportements inappropriés finissent toujours par être sanctionnés.


Coronavirus : « Balance ton voisin » pendant le confinement ?
Le Bien Public (Dijon), 1er avril 2020

Le spectre de la délation ressurgit avec les règles de confinement imposées aux Français depuis le 17 mars.

Geste citoyen ou vilaine dénonciation ? Depuis le 17 mars, de nombreux Français se « balancent » entre eux auprès des forces de l’ordre, pour signaler ceux qui ne respectent pas les règles de confinement. « Nous avons des appels incessants de personnes qui dénoncent des regroupements de jeunes ou autre », confie un agent de police du Grand Est. À ses yeux, c’est plutôt une bonne nouvelle : « C’est bien la preuve que la majeure partie des gens ont pris conscience de la situation. »

Une dénonciation, une intervention

Car il ne s’agit pas seulement de rapporter un délit, mais aussi de faire œuvre de santé publique.

Aux premières heures du confinement, les appels au 17 ont explosé, augmentant dans certaines zones de 40 à 50 %. Il s’agissait alors en grande majorité de demandes de renseignements concernant les dérogations de déplacement. Aujourd’hui, le pli est pris et « le surplus d’appels vers Police secours est moindre », selon le ministère de l’Intérieur.

Les dénonciations en revanche continuent. Impossible de les quantifier. Mais on sait que policiers et gendarmes sont contactés par des riverains se plaignant de bars restés ouverts derrière les rideaux, de leur voisin qui reçoit du monde, de familles avec enfants se retrouvant en groupe dans les parcs… Sans le dire ouvertement, le ministère de l’Intérieur confirme que ces appels donnent toujours lieu à intervention : « Les patrouilles sont parfois localement interpellées pour des individus qui ne respectent pas les mesures de confinement, indique la place Beauvau. « Chacun doit respecter les gestes barrières. Ces appels ne restent pas sans action de notre part », appuie le policier du Grand Est. Les dénonciations peuvent donc donner lieu à des verbalisations ou à des retours en confinement. Et donc prouver leur efficacité.

D’autres voies de signalement

« Les signalements permettent aussi d’orienter les patrouilles », complète la gendarmerie nationale. L’institution militaire propose aussi de passer par « les bailleurs sociaux, les services municipaux ou les élus », notamment dans les petites communes. « Cela peut permettre de désamorcer la situation par le dialogue », pointe la gendarmerie.

Visiblement conscientes que le sujet reste sensible en France, où la référence à l’Occupation revient très vite, les forces de l’ordre restent prudentes et n’incitent pas ouvertement les Français à la dénonciation. Le tchat de la police nationale se garde de le suggérer aux internautes. « Faut-il dénoncer les non-respects de confinement ? », lui a-t-on demandé. « Non, les forces de l’ordre constateront les infractions sur la voie publique », répond la police.

Le 17 doit être réservé aux appels d’urgence. Dénoncer son voisin n’en fait pas partie, rappelle la police, qui conclut : « Restez chez vous et prenez soin de vous. »


Coronavirus et confinement : à Lille, le 17 saturé par des appels de délation
RTL, 21 mars 2020

En pleine crise sanitaire, le standard du 17 est submergé d’appels en tout genre. Certains en profitent même pour dénoncer leurs voisins qui ne respectent pas les consignes de confinement. « On a plus l’impression d’être standardiste que policiers », confie un agent du Nord.

En cette période de confinement, chacun a un rôle à jouer. Il est interdit d’appeler le Samu (15) pour tout et n’importe quoi, tout comme le numéro Police-secours (17). Depuis cinq jours, le 17 est pourtant saturé, bien que ce soit aussi un numéro d’urgence. À Lille, par exemple, les opérateurs sont débordés.

Sur la plateforme d’urgence, au commissariat, les policiers doivent gérer les angoisses de certaines personnes confinées, et surtout beaucoup de questions. Un contexte qui vire aussi à la délation : les habitants n’hésitent pas à dénoncer leurs voisins qui ne respectent pas les consignes. Ces agents du Nord renvoient ces demandes vers le numéro vert mis en place par le gouvernement : il s’agit de ne pas encombrer la ligne d’urgence.